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Déficit public : quelles causes ? Quels remèdes possibles ?

vendredi 31 mai 2024

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Le mois de mai est en général celui où le citoyen respectable, « payant l’impôt », comme on disait à l’époque de Guizot et du suffrage censitaire, s’acquitte de sa déclaration de revenus. Nous l’avons fait scrupuleusement. Une fois ce devoir accompli, alors que nous connaissons le montant de notre future contribution, nous sommes en droit de nous interroger sur le bon usage de l’argent public et par les temps qui courent, sur l’importance du déficit public.

Chiffré à 5.5% pour 2023, contre les 4.9% attendus par les prévisionnistes, il est à l’origine d’un plan de redressement étalonné à 20 milliards d’économies.
Selon Bruno Le Maire, la situation provient moins d’un excès de dépenses que d’une insuffisance des recettes. Ce qui ne l’empêche pas de faire un choix politique en totale contradiction avec ce constat : réduire les dépenses plutôt que rechercher de nouvelles recettes.

Des dépenses publiques en recul :

En 2023, la dépense publique a diminué de 1.5 point de PIB par rapport à 2022, et de 2.3 points de PIB par rapport à 2021.
La charge de la dette publique dont le montant est pourtant croissant, diminue et s’établit à 1.8 % du PIB contre 2.4% en moyenne précédemment.

Des recettes qui diminuent :
Le ralentissement économique a entraîné une baisse des bénéfices des entreprises et donc des impôts prélevés sur ces bénéfices.
Le recul de l’inflation a entraîné une diminution des rentrées liées à la TVA.
Le renchérissement du crédit a généré une baisse des transactions immobilières et donc moins de taxes sur les mutations de biens.
Mais à ces paramètres liés à la conjoncture économique, s’ajoutent des mesures qui résultent de choix politiques gouvernementaux.
La baisse des impôts de production, et la suppression de la dernière tranche de la taxe d’habitation sont la cause d’une perte de 6.2 milliards de recettes.
Le blocage des salaires et leur décrochage par rapport à l’inflation ont des incidences sur le niveau des cotisations sociales collectées et sur l’impôt sur le revenu des salariés.
Si l’on ajoute quelques exonérations de cotisations des entreprises, comme le « bandeau famille », comprenez les exonérations de cotisations familiales, particulièrement sur les salaires de 2.5 à 3.5 SMIC, dont il est avéré qu’elles sont inutiles tant pour la compétitivité des entreprises que pour la création d’emploi, on peut ajouter encore 1.6 milliard d’euros de dépenses improductives…

Clairement, une bonne partie du déficit de l’État résulte de l’idéologie antifiscale du gouvernement.

Et si on faisait payer, un peu, les ultrariches ?

En taxant a minima, de 1% le patrimoine des 1% de Français les plus riches, on obtiendrait 30 milliards de recettes.
En taxant de 1% les dividendes distribués, on récupèrerait 2.4 milliards de recettes supplémentaires.
En triplant la taxe sur les transactions financières (de l’ordre de 0.3%) pour la rapprocher de 1% de taxation, on obtiendrait 4 milliards d’euros.

Et si l’on introduisait un peu plus de justice sociale dans les cotisations ?

La CSG contribue pour une bonne part au financement de la protection sociale. Mais cette contribution s’applique de façon proportionnelle aux revenus des actifs avec un taux unique à 9.2%. Le système est un peu plus progressif chez les retraités avec une tranche de revenus exonérés, puis une contribution à 3.80 %, puis une tranche intermédiaire à 6.60% et enfin une tranche à 8.20%.
Louis Maurin, président de l’Observatoire des inégalités, propose d’appliquer la même progressivité aux actifs. L’inconvénient du système réside dans les effets de seuil. Un salarié bénéficiant d’une augmentation le faisant changer de tranche de CSG, pourrait in fine percevoir un salaire net inférieur au salaire avant augmentation, la majoration de CSG entraînant une retenue supérieure à l’augmentation perçue !

Pour une vraie progressivité :

A ce système, nous semble préférable une réelle progressivité, calquée sur celle qui s’applique à l’impôt sur le revenu. Le taux supérieur de CSG ne s’appliquerait qu’à la tranche de revenu dépassant la tranche de revenu assujettie au taux précédent.
Ce système permettrait d’effacer les effets de seuil et de mettre davantage à contribution les plus gros revenus, dans un souci d’équité.

Mais alors, pourquoi ne pas fusionner CSG et impôt sur le revenu ?
Parce qu’il y aurait un risque de voir à terme, le budget de la protection sociale intégré au budget de l’État, avec le danger de voir la part accordée à la protection sociale servir de variable d’ajustement.
Parce que nous sommes encore dans un système "bismarckien", où les cotisations financent les prestations. Nous avons deux lois de finances, débattues et votées distinctement, le budget de l’État d’une part et la loi de financement de la Sécurité sociale d’autre part. Fusionner CSG et impôt sur le revenu risque d’altérer fortement les moyens consacrés à la protection sociale.

Pour l’UNSA Retraités, pour consolider les comptes publics et restaurer leur équilibre, une profonde réforme fiscale et une réflexion sur une nécessaire progressivité de la CSG s’imposeraient.